Tout est réuni pour que le lecteur
ne lâche pas le livre

CULTUREZ-VOUS
Février 2013

Ce n'était plus possible pour la littérature de tourner le dos au monde afin de se préserver face aux nouveaux modes de communication et aux nouveaux supports, le monde changeait à une vitesse vertigineuse, devenait à chaque seconde de plus en plus incompréhensible et insaisissable. Il y avait un sacré boulot pour les écrivains. (page 22)

Gary Montaigu est un auteur populaire qui rencontre autant de succès que de maîtresses. En plus de recevoir l'International Book Prize, il devient le héros d'une émission de télé-réalité. Pour Un écrivain, un vrai, il est filmé du matin au soir, qu'il écrive, qu'il mange, qu'il se dispute avec sa femme ou qu'il aille se bourrer la gueule dans les bars. Les spectateurs donnent leur avis sur le roman que la star écrit sous leurs yeux, avis que ce dernier doit prendre en compte. Le premier roman participatif est né. Et l’événement est de taille puisque l'auteur principal est la star des lettres américaines, l'International Book Prize, l'homme à femmes.

Le spitch donne envie, c'est assez original, mais on n'est pas seulement dans le voyeurisme que suppose le concept de télé-réalité. Pia Petersen propose une véritable réflexion, à travers son héros malgré lui, sur le but de la littérature, sur les dérives de la télé-réalité, sur le rôle de l'écrivain et plus généralement de l'intellectuel.

L'International Book Prize. Tiens donc. Il faisait désormais partie de l'élite intellectuelle et depuis il se compromettait dans une télé-réalité et il ne savait même plus pourquoi il faisait ça. (page 54)

C'est que Gary finit par n'en plus pouvoir, il pense être devenu la pute de la littérature, malgré de bonnes intentions. On ne sait pas comment s'est arrêtée l'émission, mais on sait dès le début, grâce à deux fils de narration qui s'entremêlent, qu'elle ne s'est pas terminée et qu'un malheureux événement est survenu. On avance dans l'émission en même temps qu'on avance, après, lorsque Ruth, sa femme tellement dévouée qu'elle clame à qui veut l'entendre que sans elle il n'est rien, tente de le convaincre par tous les moyens de reprendre le tournage.

Pia Petersen ajoute ainsi au récit une dose de suspense. Tout est réuni pour que le lecteur ne lâche pas le livre: une intrigue intéressante et bien ficelée, du suspense, un rythme (étant dans l'incapacité de trouver l'adjectif qui me convient, je vous laisse choisir, mais sachez qu'il se trouve entre moyen et effréné), une profonde réflexion sur l'écriture, la littérature, les médias, les gens, l'époque, des personnages à haute teneur psychologique, une écriture fluide qui rend la lecture agréable.

Pourtant, j'ai mis du temps à entrer vraiment dans le roman. Je ne sais pas ce qui clochait au début, ni même si quelque chose clochait, mais j'ai mis quelques dizaines de pages avant de me retrouver quelque part entre moyen et effréné.

Et finalement, ça valait le coup. Pour toutes les qualités citées quelques lignes plus haut, pour le plaisir de lecture, même tardif, et pour le dénouement: Un écrivain, un vrai vaut le coup.

Une bonne surprise de la rentrée!