Être ordinaire, est-ce vraiment
un but à poursuivre avec fierté?

MICMAG
Marie Torres
Janvier 2013

Native du Danemark, Pia Petersen vit et travaille entre Paris
et Marseille. Son sixième roman, Un écrivain, un vrai
nous transporte dans le monde de la téléréalité,
de la manipulation légalisée, de l’intelligence dévalorisée.
Un petit chef d’œuvre qui donne à réfléchir…

Guy Montaigu, écrivain américain, vient de recevoir le prestigieux International Book Prize, symbole de reconnaissance et de succès. Un tournant dans sa vie littéraire : désormais il se sent libre d’écrire tout ce qu’il a toujours voulu. Mais Ruth, son épouse ambitieuse et dominatrice, le pousse sur une autre voie: la téléréalité.

Il avait longtemps hésité avant d’accepter le projet mais maintenant il était content d’avoir signé le contrat. Ce n’était plus possible pour la littérature de tourner le dos au monde afin de se préserver face aux nouveaux modes de communication et aux nouveaux supports, le monde changeait à une vitesse vertigineuse, devenait à chaque seconde de plus en plus incompréhensible et insaisissable. Il y avait un sacré boulot pour les écrivains.

L’émission de téléréalité, Un écrivain, un vrai, débute. Sous les yeux de caméras, Gary écrit. un roman participatif. Chaque soir, les téléspectateurs découvrent un chapitre et sont invités à voter «J’aime, je partage», à supprimer un personnage voire à en proposer un nouveau …

L’émission est un succès. C’est passionnant d’assister au quotidien d’un génie, d’être témoin de l’acte créateur en direct, d’y participer. Mais Gary supportera-t-il longtemps d’écrire sous influence? D’accepter les exigences et les recommandations du public? Admettra-t-il que ses romans se lisent à la télévision pour coller au monde moderne?

Il devait prendre en compte tous les avis et son roman se réduisait au fur et à mesure et tout ça pour séduire le télé-lecteur. Il fabriquait désormais de la banalité, en faisait une star, un mythe. Les idées de son roman étaient ordinaires, petites, sans complexité. Il dit que si la littérature créait ou relayait le Mythe et écrivait le récit du monde et de l’homme alors la situation était dramatique parce que le roman se calquait de plus en plus en plus sur la téléréalité. Etre ordinaire, est-ce vraiment un but à poursuivre avec fierté?

Pia Petersen, native du Danemark mais qui vit et travaille entre Paris et Marseille, nous décrit non seulement le monde de la téléréalité mais nous fait entrevoir ce que notre société pourrait devenir. Pire, ce qu’elle est en train de devenir. Le tout avec beaucoup de justesse et de talent.