Un livre qui fait réfléchir,
qui donne envie de réagir

LE CARNET DE MYRIAM THIBAULT
Avril 2013

Tout le monde me parle de ce roman depuis plusieurs mois. Je vois beaucoup d’articles. Un ami écrivain m’a même dit qu’il ne le lisait qu’à petite dose de peur de le finir trop vite, qu’il faisait parti de ces livres qui font du bien. Ce roman attend donc sur ma table de chevet avec des dizaines d’autres, depuis plusieurs mois. Un matin, je me décide à le prendre. Et je ne regrette pas.

Gary Montaigu est écrivain, il est marié à une belle femme, Ruth qui l’aime et le soutient, et il vient de remporter l’International Book Prize. Il était déjà connu auparavant, mais là, c’est la consécration. Comme tous les événements de ce genre, les propositions vont fuser de tous côtés vers Gary et sa femme. Et en particulier, une proposition retient son attention: l’émission Un écrivain, un vrai qui est une télé-réalité pour les écrivains. Il va être filmé, pour que l’on voit sa manière de travailler. Mais un élément non négligeable fait parti du jeu: le public participe à la construction du roman. À partir de là, tout est possible, et toutes les questions concernant l’art, la création, la personne de l’écrivain sont émises.

Tous les écrivains et amoureux de la littérature devraient lire ce livre. Mais aussi tous les artistes en règle générale. Pia Petersen a réussi à cerner, il me semble une des plus grande peur de l’écrivain, de l’artiste: qu’on lui vole sa création, qu’on la court-circuite, quel qu’en soit le moyen. Ici, c’est à travers la télévision et la violence du public, la violence des gens, mais aussi la bêtise des producteurs qui doivent faire du chiffre à tout prix. Pia Petersen pose des questions: L’artiste est-il libre? Quelles sont les conséquences de la télé-réalité? Qui est réellement l’écrivain? Quelle est sa fonction dans la société? Et quelle est cette société dans laquelle nous vivons?

Nous vivons dans un monde de l’immédiateté, où tout le monde épie tout le monde, où tout est en train de se transformer:

Gary bredouilla que c’était ainsi, le monde d’aujourd’hui, qu’il fallait du réel, quelque chose d’instantané, d’immédiat, que les romans se lisaient à la télé, c’est le nouveau monde et il balbutia que la fiction, c’était maintenant en dehors du roman qu’elle s’écrivait, parce que le quotidien était mis en fiction. C’était troublant.

C’est malgré tout un texte d’une grande violence morale quand on y réfléchit. Pia Petersen expose la violence des médias, la violence de la télé-réalité, que l’on peut étendre aux réseaux sociaux, bien qu’ils ne soient pas directement mis en cause ici.

C’est un livre qui fait réfléchir, qui donne envie de réagir. Mais il y a aussi une réflexion sur l’objet livre, sur ce qu’il va devenir dans ce monde où tout devient virtualité: On lira votre roman par l’image. C’est magnifique, non? Les lecteurs n’auront même plus besoin de l’objet livre. Cette phrase touche l’écrivain, touche l’amoureux de la littérature, l’amoureux du livre.

C’est un roman à lire, à offrir. Sûrement l’un des romans qui m’a le plus marqué en ce premier semestre 2013.