Dans la tradition des écrits de Voltaire

PLAISIRS À CULTIVER
Février 2014

Morgane est une jeune journaliste vivant à Los Angeles. C’est lors d’une enquête sur Jansen, le fondateur d’une secte, qu’elle fait la connaissance de Dieu. Ou du moins d’un SDF grincheux qui dit être Dieu. Ce dernier souhaite que Morgane écrive ses mémoires pour que les hommes puissent l’aimer à nouveau. Profondément athée, Morgane se laisse néanmoins captiver par cet homme allant jusqu’à le loger chez elle et lui proposer d’être son assistant.

Morgane aimerait qu’il arrête de parler pour qu’elle puisse penser. L’homme qui s’appelle Dieu l’intrigue, l’attire, elle a envie d’aller vers lui et en même temps elle veut qu’il s’en aille, elle a envie de lui dire de s’en aller le plus loin possible mais il semble si sûr de lui, comme s’il en savait plus long que quiconque sur toute chose et ça la fascine et la dérange.

Mais bientôt, elle s’interroge sur l’identité de cet homme. Des faits très étranges se produisent autour de lui: des ombres inquiétantes apparaissent lorsqu’il se met en colère, la mer s’ouvre autour de lui et une lumière blanche et intense apparait quand on le prend en photo.
Morgane n’est pas la seule à remarquer les dons de celui qui se fait appeler Dieu, Jansen s’y intéresse de près et il se voit déjà l’utiliser comme emblème pour son église.

On retrouve dans
Mon nom est Dieu la formation philosophique de Pia Petersen. Dans la tradition des écrits de Voltaire, elle interroge notre rapport à la religion sous la forme d’une fable. Ici Dieu s’inscrit dans le quotidien de Los Angeles, il porte des tongs, boit de la bière et aime se faire draguer par de belles femmes. Mais s’il est revenu sur terre, c’est surtout pour essayer de comprendre sa création. Les hommes le détestent, lui en veulent pour tous leurs malheurs et Dieu veut réhabiliter son image. Il pense avoir laissé trop de liberté à l’homme:

Il dit d’un ton maussade qu’il est trop démocrate, voilà tout. S’il n’avait pas donné le libre-arbitre aux hommes, il n’en serait pas là. On lui en veut. Pour se venger, on le rebaptise, on dispense des interprétations farfelues de ce qu’il est censé avoir dicté et là encore, c’est à cause de sa gentillesse.

Les différentes églises tentent de récupérer Dieu dont le discours pourrait remettre en cause leurs règles, leurs diktats. Il se sent plus aimé par la secte de Jansen mais il se rendra compte qu’il ne s’agit que de l’exploiter, de l’utiliser pour embrigader plus de fidèles.

L’idée de Dieu défendue par Pia Petersen est intéressante puisque son personnage remonte aux mythologies antiques. Dieu s’appelait, avant, Zeus et il aimait les histoires qui se racontaient sur lui. Le Dieu du livre aime la vie, l’amour et est tolérant. Un message qui est clairement dévoyé par les différentes églises.

Mon nom est Dieu questionne le besoin d’un esprit transcendant, d’une hiérarchie supérieure chez l’homme d’autant plus crucial en ces temps troublés. Pia Petersen dénonce les intermédiaires (religion ou secte) qui transforment le message de Dieu en obligations et en contraintes. Elle met surtout en avant ce qui pour elle doit rester le plus important: la liberté de vivre et de penser. Liberté qui est de nouveau portée par une écrivaine comme dans Instinct primaire.

Une fable drôle et pertinente.