Le vitriol selon Pia Petersen

SERVICE LITTÉRAIRE
Cécilia Dutter
Février 2013

Une réflexion salutaire sur la place de l'artiste
à l'ère de la consommation de masse.

Auteur au sommet de sa gloire, Gary Montaigu vient de recevoir le prestigieux International Book Prize. On lui propose alors de devenir le héros de Un écrivain, un vrai, une émission de téléréalité interactive dans laquelle il jouera son propre rôle, les téléspectateurs étant conviés à intervenir sur l'intrigue de son nouveau roman qui est en cours d'écriture. Poussé par son épouse, mante religieuse vampirisant son talent pour servir une ambition personnelle démesurée, Gary accepte à contre-coeur de se prêter au jeu et tente de se persuader qu'il concourt ainsi à populariser la littérature en la faisant entrer dans les foyers par l'intermédiaire du petit écran. Mais la storytelling tourne court. Enfermé dans une histoire qui lui échappe, l'auteur perd peu à peu de son pouvoir créatif. Désormais incapable d'écrire une ligne, fuyant la vie publique qui lui est imposée, il sombre dans une dépression qui le conduira à sa perte.

Serait-ce à dire que l'abrutissement télévisuel a eu raison de lui? Pour plaire à un public volatile, l'écrivain d'aujourd'hui en est-il réduit à créer sur commande des oeuvres de divertissement rassemblant le plus grand nombre?

On l'aura compris, c'est à une réflexion salutaire sur la place de l'artiste à l'ère de la consommation de masse que nous invite ici Pia Petersen. Trempant sa plume dans le vitriol, elle dénonce avec force la sous-culture dont il se rend parfois complice, notamment lorsqu'il renonce à ses idées et délaisse sa mission première: celle de penser le monde.

La fin du roman, habile et délicieusement cynique, renvoie les auteurs à leurs responsabilités tout comme les lecteurs à leurs choix.

Un mot d'ordre commun: Résistance!